
De 19200 m3/ jour, la capacité de traitement de la station d’épuration de Cambérène est aujourd’hui largement dépassée en raison de la forte augmentation de la population de la banlieue. Dans cet entretien, Monsieur Pedre SY est revenu sur l’importance du projet d’extension de cette station mise en service en 1989, la hausse considérable attendue de sa capacité de traitement, mais aussi le recentrage que l’ONAS compte opérer sur son savoir-faire, notamment la délégation des ouvrages d’assainissement au profit des partenaires privés. Le Directeur de l’Exploitation et du Contrôle de la Station d’Epuration de Cambérène a aussi insisté sur la nécessité de valoriser davantage les sous-produits. Au cours de cet entretien, Monsieur Pèdre SY a décliné la place que leur Direction jouera pour la satisfaction des besoins des populations.
Pouvez-vous nous parler des missions de votre Direction ?
Notre mission en tant que Direction est l’exploitation et la maintenance des installations d’eaux usées, d’eaux pluviales, des stations d’épuration, des stations de pompage. Elle consiste à assurer le suivi de tout ce qui est travaux d’accompagnement, le suivi des projets avec la Direction des travaux. Nous faisons aussi le suivi des contrats de sous-traitance dans la mesure où le réseau de la région de Dakar est géré par trois sous-traitants. Nous avons en charge la gestion et la maintenance du patrimoine, la valorisation des sous-produits des stations d’épuration, notamment les boues stabilisées qui peuvent servir à amender le sol comme engrais, le biogaz qui peut nous permettre de réduire la consommation énergétique et les eaux épurées qu’on vend actuellement aux maraîchers et aux entreprises du secteur des BTP.
Aujourd’hui, quelle est la place des stations dans l’assainissement des eaux usées à Dakar et au Sénégal ?
La station de Cambérène est la station principale à Dakar. Outre celle-ci, il y a la station de la zone des Niayes, la station d’épuration de la Cité SHS, la station d’épuration de Rufisque et une nouvelle station construite à Tivaouane Peul. Mais Cambérène est la plus grande station. Elle a été mise en service en 1989. A l’origine, elle a été mise en place pour accompagner le développement de la banlieue. Tous les quartiers environnants rejettent directement leurs eaux à la station. Nous avons Almadies, Maristes, Fadia, Parcelles, Guédiawaye, Pikine, Grand-Yoff. La station de Cambérène est la station mère. Son bassin versant est très large. Elle a une capacité de 19200 m3/jour pour environ 200.000 habitants.
Quel rôle la station peut-elle jouer dans la prévention et la réduction des maladies ?
En fait, la mise en place d’une station répond à des normes. On a les eaux usées qui sont collectées et ces eaux doivent être traitées dans un milieu. La station d’épuration est entre les eaux usées et le milieu récepteur, ce qui fait que la station d’épuration permet de prendre les eaux polluées, de les traiter et les rejeter dans un milieu sans que celui-ci ne soit pollué. La station d’épuration est là pour gérer l’environnement et c’est extrêmement important. Si on gère l’environnement, on gère la santé ; la station permet d’avoir un cadre de vie idéal. Si les eaux usées sont collectées et rejetées sans traitement, il y aura des conséquences négatives sur le milieu récepteur.
Avez-vous le sentiment que le cadre de vie des populations s’est amélioré grâce à la station ?
Absolument oui ! S’il n’y avait pas les stations d’épuration, les stations de traitement des boues de vidange, le cadre de vie aurait été impacté de manière beaucoup plus négative. Ces stations permettent de faire la collecte des eaux usées, de pouvoir les traiter et les rejeter dans un milieu récepteur sans que ce milieu ne soit pollué. S’il n’y avait pas ces stations, les eaux allaient être rejetées dans la nature sans traitement préalable avec les conséquences qu’on connait en termes de maladies, de dégradation de l’environnement. La station est là pour gérer l’environnement, améliorer le cadre de vie des populations.
Quelles sont les innovations que votre Direction compte apporter ?
Avec l’arrivée du nouveau Directeur Général, la Direction ne s’appelle plus la Direction de l’Exploitation mais la Direction de l’Exploitation et du Contrôle. Il y a une nouvelle vision qui est là ; c’est pour vraiment nous recentrer sur notre cœur de métier, notre savoir-faire, d’aller vers la délégation des ouvrages que l’ONAS a eu à construire pour impliquer davantage le privé. L’autre point aussi, c’est de changer l’image de marque de l’ONAS auprès des populations et des usagers. C’est une des missions que l’ONAS a déléguées à la Direction de l’Exploitation. Le premier contact des populations quand il y a des problèmes c’est la Direction de l’Exploitation. Par conséquent, de par notre comportement, nos manières de faire, nous avons un grand rôle à jouer. Nous devons avoir une perception meilleure de nos missions, donner une image beaucoup plus positive à l’endroit des populations et aux usagers.
Vous avez tantôt évoqué la question de la délégation des ouvrages. Quels sont justement vos rapports avec le privé ?
Tout le réseau de Dakar est géré par des opérateurs privés au nombre de trois. En plus, nous avons aussi les stations de traitement des boues de vidange qui sont gérées par le privé. Nous avons les meilleures relations parce que ce sont des entreprises qui créent de la valeur ajoutée et de la richesse. La politique que l’Etat est en train de mener consiste à construire des ouvrages puis de les transférer au privé. Je pense que c’est extrêmement important, le partenariat-public privé ; et l’ONAS a une grande expérience en la matière. Le réseau de Dakar est géré depuis plus de 20 ans par le privé et nous allons vers une extension de ce partenariat y comprise la délégation des ouvrages au profit du privé.
Pouvez-vous nous parler de l’importance du projet d’extension de la station, par rapport à l’augmentation de la demande ?
La station d’épuration qui a été construite pour 19200 m3/jour a actuellement dépassé sa capacité de traitement. Dans le cadre du plan directeur de l’assainissement de la région de Dakar, des travaux sont en cours pour la réhabilitation et l’extension de la station d’épuration de Cambérène. Grâce à ce projet, la capacité de traitement de la station va atteindre 90000 m3/ jour ; de même, nous allons augmenter la production et l’utilisation du biogaz, ce qui va permettre de réduire la consommation énergétique. Ensuite, nous allons mettre en place un système de traitement des odeurs, de sorte que quand vous entrez dans la station, vous ne sentiez pas les odeurs. Actuellement si vous passez à la hauteur de l’autoroute, vous sentez les odeurs en raison de la proximité avec la station d’épuration. Le projet que nous allons mettre en place permettra à la station d’avoir une capacité de traitement de 90.000 m3/jour, de réduire d’au moins 50% la consommation énergétique, d’avoir un système de traitement des odeurs et de valoriser les eaux épurées.
L’autre aspect du projet d’extension, c’est la valorisation des sous-produits. La réutilisation des eaux usées traitées peut valoir beaucoup de satisfaction dans le cadre du maraichage. Il y a aussi les boues stabilisées qui peuvent servir d’engrais pour amender le sol ; de même que le biogaz peut permettre une réduction de la consommation énergétique. Donc, dans tout le processus, on collecte, on traite, on valorise les sous-produits tout en préservant l’environnement et même les ressources en eau. Si à Dakar, on devait rejeter toutes les eaux usées dans un fleuve, les ressources en eau allaient être polluées. Le traitement est extrêmement important. Il permet de préserver l’environnement, de lutter contre les inondations et de protéger les ressources en eau.
Avec le projet d’extension, on aura un potentiel énorme. On pourra recourir à une plus importante utilisation des eaux traitées pour faire notamment du maraichage. Cela va éviter d’utiliser l’eau potable pour les besoins du maraichage. Il y a beaucoup de choses qu’on peut faire avec les eaux usées. Vous allez à Thiès, la station est implantée dans une zone maraichère et depuis 2007, les maraichers utilisent l’eau épurée de la station. Les gens travaillaient trois mois l’année, mais maintenant, ils travaillent 365 jours l’année. C’est un aspect très important et ça peut être rentable. C’est donc un projet innovant qui permettra de prendre en compte le développement de la banlieue. Cela permettra de mettre la station aux dernières normes.
Qu’en est-il de la gestion des eaux pluviales ?
Il faut souligner que l’Etat a mis en place, le plan décennal de lutte contre les inondations et dans ce cadre, l’ONAS a eu à réaliser depuis 2015, des programmes pour lutter contre les inondations ; lesquels ont eu des résultats probants. En 2017, on a eu à cibler des zones inondées aux parcelles assainies en y installant des stations de pompage d’eaux pluviales. Cela a contribué à régler beaucoup de problèmes et d’avoir un bon comportement par rapport aux eaux de pluie, l’année passée.
Dans la même lancée, il est mis en place un réseau de drainage aux Almadies et à Ngor qui a permis de régler énormément de problèmes dans cette zone, sans compter ce que l’ONAS a eu à faire en 2013 et 2014. Par ailleurs, dans la gestion des eaux pluviales, il y a ce qu’on appelle l’entretien préventif des ouvrages ; c’est extrêmement important. Aujourd’hui, on a pour le réseau d’eaux pluviales un patrimoine d’environ 180 km à Dakar, 40 stations d’eaux pluviales. Au niveau du pays, le patrimoine du réseau d’eaux pluviales est de 313 à 314 km tandis que les stations d’eaux pluviales sont au nombre de 76 sans compter les 9 bassins que nous gérons. Ce réseau, il faut le curer en permanence et c’est ce que nous faisons avant l’hivernage afin de permettre une bonne évacuation des eaux.
Les stations de pompage sont entretenues, maintenues pour qu’elles puissent bien fonctionner. De même, nous faisons le curage des bassins. Le bassin de la station de pompage de la zone de captage est curé chaque année, de même que tous les autres bassins dont l’ONAS a la gestion. Toutes ces actions ont permis d’avoir de bons résultats dans le cadre de la gestion des eaux de pluies. D’ores et déjà, on a commencé à travailler sur la matrice des actions relative à la préparation de l’hivernage, sous la direction du Directeur Général. On est en train d’anticiper sur ce que nous devons faire en 2018. Cela montre une fois de plus notre détermination à résoudre la question des inondations.
Parlez-nous des contraintes auxquelles fait face la station ?
Les contraintes, c’est d’abord le dépassement de la capacité de la station. D’ailleurs, c’est cela qui a même justifié, dans le cadre du plan directeur de l’assainissement, le projet qu’on va lancer en 2018. Comme je vous l’ai dit, la station a été construite pour 19200 m3/jour. Mais, si la population augmente, on arrive, à un moment donné, à un seuil de saturation, c’est ce qui a motivé ce projet dans le cadre du plan directeur de l’assainissement de Dakar. L’autre contrainte est qu’on est dans une zone un peu basse qui reçoit la quasi-totalité des eaux pluviales des quartiers environnants. Cependant, on a pu trouver les voies et moyens de gérer le fonctionnement de la station d’épuration. Je pense que le projet qu’on s’apprête à dérouler va permettre de régler définitivement les problèmes auxquels la station d’épuration de Cambérène est confrontée.